La Copropriété aujourd’hui

Damien Lutz, nous explique les enjeux et les réalités de la copropriété à notre époque.

La copropriété est une réalité qui touche 25% des français.

Ces copropriétaires ont la plus part du temps un mode d’habitat plutôt subi que choisi. Ils vivent une tension entre leur légitime aspiration à une propriété individuelle, et les réalité de la copropriété, puisqu’il y a des parties communes. Le statut de la copropriété qui date de 1965, avec un décret d’application de 1967, est un régime juridique touffu et contraignant, qui a été plus ou moins revu au cours des années sans changement fondamental. La copropriété aujourd’hui est un domaine difficile puisqu’il faut gérer l’antagonisme entre propriété individuelle et propriété collective, difficile aussi dans son mode de gestion.

En copropriété les logements sont occupés à peu près pour la moitié par des copropriétaires dit occupants, les autres sont des locataires, qui sont les locataires des propriétaires bailleurs. Ces deux sortes de propriétaires non pas forcément les mêmes motivations et les mêmes désirs par rapport à la gestion de leur copropriété.

Concernant le chauffage il est collectif dans 42% des copropriétés, 35% avec des chaudières collectives, 5% chauffage urbain, 2% autres. Ce chauffage collectif est d’autant plus présent dans les copropriétés de grandes tailles. 80% des immeubles de plus de 100 logements ont un chauffage collectif, et parmi ces immeubles là 30% d’entre eux sont des immeubles construits entre les années 60 et la fin des années 70.

50% des syndics sont issus de grands groupes immobiliers. Depuis la fin des années 90 on assiste à une concentration importante de portefeuilles pour plusieurs raisons, la premières étant que la plus part des syndics, installés dans les années 60, sont en train de prendre leur retraite, la deuxième raison sont les difficultés liées au métier, et la troisième raison c’est la puissance financière de ces groupes immobiliers qui font des offres très importantes dans le rachat de portefeuille.

Selon qu’on travaille dans un groupe ou qu’on est un syndic indépendant, l’attitude ne sera pas forcément la même, souvent différente.

Le chargé de copropriété dans un grand groupe va souvent changer, il y a une relative instabilité des chargés de copropriété dans les grands groupes. Avec un syndic indépendant la stabilité sera plus au rendez-vous, cela se ressent de manière importante sur la gestion de la copropriété. Avec un grand groupe les copropriétaires seront plus dans une attitude de méfiance, avec un syndic indépendant avec lequel ils s’entendent relativement bien la confiance sera plus facilement au rendez-vous. Ce sont des aspects à avoir en tête lorsque vous abordez un syndic.

Damien Lutz nous explique en quoi consiste l’Assemblée Générale des Copropriétaires.

 

Aborder une copropriété se fait en trois temps. Le premier temps est l’Assemblée générale.

Toutes les décisions prises en copropriété doivent être prises par l’Assemblée générale pour être juridiquement valable.

L’Assemblée générale à lieu au moins une fois par an dans une copropriété, c’est la loi qui l’exige. Les copropriétaires sont tous convoqués mais participent de façon différente, on peut dire qu’environs 55% des copropriétaires participent de manière régulière à l’Assemblée générale de leur immeuble. Plus la taille de l’immeuble augmente plus la participation est basse. En revanche de nombreux copropriétaires même si ils ne sont pas présent physiquement, vont parfois se faire représenter en donnant un mandat soit à un voisin qu’il connait soit directement au syndic.

Les copropriétaires d’une façon générale sont peu impliqués dans la gestion de leur immeuble environs 54% disent s’y intéresser mais dans ces 54% on découvre qu’il y en a véritablement environs 20% qui s’y intéressent vraiment et qui s’impliquent dans la gestion de leur immeuble.

La décision qui sera prise pas l’Assemblée générale le sera certainement par assez peu de copropriétaires, et parmi ces copropriétaires un certain nombre qui finalement sont assez peu impliqués, d’où l’importance de bien préparer les décisions.

A l’Assemblée générale annuelle, il y a beaucoup de questions traitées, des questions d’ordre administrative (voter un budget, éventuellement initier des procédures judiciaires, désigner son syndic, désigner le conseil syndical…), des décisions financières (approuver les comptes, voter le budget, et surtout il faut préparer des travaux). Les copropriétaires pensent pour 50% d’entre eux qu’il a des travaux importants et urgents à faire dans leur immeuble. Ces travaux sont à 40% des travaux de ravalement, viennent ensuite à 25% les travaux de toiture et de couverture, ensuite des problématiques liées au remplacement des canalisations.
Les travaux de chauffage collectif ne reviennent que pour 4% des demandes des copropriétaires, c’est très peu. En effet le chauffage collectif dans une copropriété est une charge subie, c’est à dire que ça fait partie des charges et qu’on vit avec. L’important c’est la température qu’on souhaite d’où les antagonismes et les tensions qu’il peut y avoir entre les copropriétaires, mais il y a peut de demandes ou de réflexions par rapport à une baisse de ces charges.

Le Syndic gère la copropriété, il administre et veille à la bonne application des décisions prises pendant l’Assemblée Générale, suit le budget, paie les factures, prépare les travaux.

 

Le deuxième temps lorsqu’on aborde une copropriété est le syndic.

Le syndic est le personnage clé du système.

C’est lui qui est élu chaque année par l’Assemblée générale pour gérer la copropriété.
Un syndic est un homme multitâches, il doit administrer, c’est à dire d’une part veiller à la bonne application des décisions de l’Assemblée générale, et d’autre part – ce qui lui prend souvent beaucoup de temps – faire appliquer le règlement de copropriété. D’autre par ce doit être un comptable et un gestionnaire, il faut suivre le budget, il doit payer les factures, les vérifier… Il doit aussi être un peu technicien parce qu’il faut préparer les travaux, les présenter à l’Assemblée générale et ensuite les faire voter. Puis ensuite c’est un homme de loi, il exerce dans un cadre juridique précis et contraignant.

61% des copropriétaires disent qu’ils sont satisfaits de leur syndic, mais dans les 61% il y en a que 16% qui le sont vraiment, les 45 autres pour-cent se disent à peu près satisfaits de leur syndic. Malgré tout le syndic est stable 60% des copropriétés n’ont pas changer de syndic depuis 10 ans (moyenne nationale), contrairement à Paris où ça change plus souvent puisque 40% des copropriétés n’ont pas changer depuis 10 ans.
Le syndic est stable pour plusieurs raisons. Tout d’abord les copropriétaires sont peu impliqués, donc s’ils sont peu impliqués ils subissent d’une certaine manière, d’autre par ils ont peu du changement (est-ce qu’un nouveau syndic fera mieux que l’ancien?).

Le syndic est une personne soumise à des tensions.

Des tensions extérieures puisque dans les médias le syndic n’a pas bonne presse, il est qualifié parfois de malhonnête, négligeant, voir peu impliqué dans la gestion de sa copropriété. Les associations de copropriétaires ne sont pas tendres non plus.

D’un point de vue interne le syndic est aussi soumis à une pression constante. Pression des copropriétaires, demandes de tous ordres, peu de remerciements voir jamais, la plupart du temps quand on a un copropriétaire c’est pour s’entendre de dire que tout va mal, que rien n’est fait, que le chauffage est mal réglé etc.
Par rapport au chauffage le syndic est soumis encore plus à certaines demandes c’est à dire qu’il se fait régulièrement réprimandé pour mettre le chauffage en route en automne par ceux qui veulent le mettre tout de suite et ceux qui veulent le mettre plus tard, et c’est la même chose au printemps à l’extinction du chauffage.
Par rapport à ce domaine du chauffage, le syndic soumis à la pression constante va s’en décharger.
Il y a un travail de motivation du syndic par rapport au sujet à faire, c’est à dire aller jauger immeuble par immeuble sa connaissance du dossier (est-ce qu’il est bien au clair avec les types de contrats, quelles sont les relations avec l’exploitant, est-ce qu’il s’entend bien avec? etc.) C’est important pour ensuite aller plus loin.

On trouve plusieurs types de syndic dont le syndic dit autoritaire. C’est à dire qu’il s’impose à l’Assemblée générale et au conseil syndical. Il peut être autoritaires parce que c’est sa nature d’imposer des décisions, ou alors – et c’est parfois ce que soupçonnent les copropriétaires – c’est qu’il a des choses à cacher.

Autre type de syndic, celui qui est un peu manipulateur. C’est à dire qu’il va un peu créer des divisions, et va ainsi garder la copropriété en jouant plus le conseil syndical contre l’Assemblée générale, ou au sein du conseil syndical certaines personnes au lieu d’autres.

Enfin, on peut trouver le syndic dit normal, il y en a quand même beaucoup, c’est un homme de dialogue qui essai de mettre en relation toutes les composantes de la copropriété entre elle pour essayer de prendre les meilleures décisions pour l’intérêt général.

Damien Lutz nous présente le conseil syndical et en rappelle les grands principes

 

Le troisième temps concerne le conseil syndical. C’est un temps à privilégier dans votre démarche, le conseil syndic est souvent mal connu des chargés d’affaires pour des questions liées au chauffage. Le conseil syndical est obligatoire dans tous les syndicats de copropriété.

Le conseil syndical est l’instance « tampon » entre le syndic et le reste des copropriétaires.

Il a plusieurs prérogatives, d’abord il doit être consulté par le syndic pour toutes dépenses et passation de contrat ou de marché dépassant certain seuil votés par l’Assemblée générale. D’autre part il a un pouvoir de contrôle de la comptabilité mais aussi, contrôle des marchés qui sont passés, contrôle des contrats. Le conseil syndical peut à tout moment demander au syndic d’avoir accès aux contrats pour vérifier leur bonne application, accès aux devis de travaux pour vérifier que tout est fait selon la commande prévue et la décision de l’Assemblée générale. Le conseil syndical peut aussi se faire assister par des techniciens de son choix pour des dossiers particuliers. Pour le chauffage il pourrait à sa demande, et c’est légal, l’assistance d’un bureau d’études par exemple avant de présenter un projet à l’Assemblée générale.

Dans son fonctionnement la loi ne dit pas grand chose sauf que le conseil syndical à la plupart du temps un président désigné au sein du conseil syndical, donc un responsable. C’est important de connaitre ce président, puisqu’il y a diverses personnalités de président de conseil syndical comme on l’a vu pour le syndic.
Il y a des président de conseils syndicaux qui sont autoritaires c’est à dire qu’ils prennent des décisions seuls sans consulter les autres. Cela donnera un conseil syndical un peu amorphe qui va se reposer sur son président.
Il y a aussi le président de conseil syndical, qui comme pour le syndic, peut aussi être manipulateur, c’est à dire qu’il veut un peu diviser pour régner. Le travail du conseil syndical sera souvent assez inefficace pour ça.
On peut trouver aussi le président de conseil syndical « potiche » c’est à dire que c’est l’homme du syndic. Cela va donner un conseil syndical qui va enregistrer les décisions du syndic sachant que son président est là pour être la voix du syndic.
Et puis enfin, le président du conseil syndical normal, ou organisateur, qui va faire en sorte de donner du travail à certain sur certains sujets, et va réellement faire son travail de liaison entre le conseil syndical et le syndic.

En ce qui concerne les conseillers syndicaux, certains sont au conseil syndical simplement par intérêt, parce qu’ils pensent qu’ils auront les informations avant et qu’ils pourront privilégier leur intérêt personnel. D’autres sont là parce qu’ils sont suspicieux. Autre typologie de conseillers syndicaux, le conseiller syndical râleur, mais aussi le conseiller syndical travailleur, impliqué et qui est là car il a bien comprit que son rôle était un rôle de bénévole et que le travail fait au conseil est un travail positif pour les décisions de l’Assemblée générale.

Le conseil syndical à de multiples visage.

Il y a le conseil syndical qui enregistre les décisions du syndic, celui qui est une chambre « d’engueulades », mais aussi celui qui est une chambre de « bavardages » où ils ne prennent pas de décisions. Il y a aussi le conseil syndical « forteresse assiégée », c’est à dire qu’ils sont en vase clos, ils ont des projets mais ils sont coupés du reste de la copropriété, ils n’ont pas valider les choses avec le reste des copropriétaires. Enfin, le conseil syndical qui fonctionne normalement, c’est à dire qu’il joue vraiment son rôle de contre-pouvoir par rapport au syndic, son rôle de force de proposition par rapport à l’Assemblée générale, puis le conseil syndical est la pour assister le syndic et contrôler sa gestion.

 

Damien Lutz revient sur les clés du bon fonctionnement entre les copropriétaires et le syndic.

 

Une décision prise par l’Assemblée générale le sera d’autant mieux qu’elle aura été préparée avec le syndic en concertation avec le conseil syndical.

Le sujet de chauffage collectif est un sujet délicat, en effet il va faire ressortir la plupart des antagonismes entre le désir de propriété individuel et les efforts pour le commun. Il sera l’occasion d’un certain nombre de désaccords sur le niveau de confort, de divergences puisque les uns ont des moyens financiers et pas les autres, de priorité, certains viennent d’acheter et ne veulent pas investir dans le chauffage, d’autres vont bientôt vendre et ne veulent pas non plus faire des investissements.
Par rapport à ce sujet va ressortir aussi tout le manque de confiance par rapport au syndic, l’opacité des relations entre le syndic et l’exploitant, le manque d’informations.

Dans un premier temps ce qui est important c’est de bien connaitre le syndic et bien connaitre son parc d’immeubles, bien connaitre l’immeuble en particulier sur lequel vous avez une offre. Quels sont les travaux à prévoir, quels sont les travaux qui ont déjà été fait, quels sont les travaux qui sont à faire par exemple par rapport à l’aspect financier.
Il faut rencontrer le conseil syndical, afin de le connaitre et lui apporter des informations qu’il n’a pas forcément. L’idéal est de commencer par une rencontre sur site, pour faire un point sur l’exploitation de la chaufferie, leur ouvrir les yeux sur le volume de consommation, leur donner quelques renseignements sur la qualité de l’exploitation. Et ensuite tenter de savoir quels sont leurs demandes, leur souhaits ou alors leurs blocages.
Une fois le conseil syndical et le syndic connu, il faudra tout au long de la démarche respecter les rôles de chacun, et leur identité propre. D’autre part il faudra être absolument rassurant car le chauffage est un sujet de peur parfois irrationnel. Il faudra aussi être patient car un dossier de cette envergure peut prendre plusieurs années pour aboutir, en effet ce n’est pas forcément une assemblée générale ordinaire qui va prendre les décisions, il faudra peut être proposer au syndic de traiter le sujet dans une assemblée dite spéciale pour être vraiment sur le sujet qui peut parfois être complexe. Il faudra aussi être transparent, c’est ce que les propriétaires attendent pour éviter le manque d’information.

Dans cette démarche il y a un certain nombre d’étapes à franchir dont les principales sont établir un bilan général de la copropriété pour donner envie de traiter le sujet. Ensuite proposer une aide technique, un bureau d’études, et il faudra peut être aider le syndic à établir un cahier des charges pour le bureau d’études.
Il faudra aussi proposer des mécanismes de financement, et surtout faire ressortir le fait que si on fait des travaux des économies sont possibles, et que si des économies sont possibles elle permettront de financer des travaux.
Il faut aussi expliciter ce que sont les certificats d’économie d’énergie qui commencent à être connus des copropriétaires mais dont le mécanisme reste obscure.

Publié le 23 mai 2014


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